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rapport 2013 sur les droits de l'enfant

Le 22 novembre 2013
dix propositions pour valoriser la parole de l’enfant en justice
Proposition 1
L’enfant capable de discernement peut être entendu par le juge, cette audition est de droit
lorsque l’enfant en fait la demande (article 388-1 du code civil). Cette demande est fréquente
auprès du juge aux affaires familiales lors des séparations parentales.
La mise en oeuvre de ce droit bute sur l’appréciation du discernement de l’enfant faute de critères
et de pratiques homogènes, créant des déceptions et des inégalités de traitement chez
les enfants qui demandent à être entendus.
Sachant que dans son « observation générale », le comité des droits de l’enfant considère que
l’article 12 de la CIDE n’impose pas d’âge limite à ce droit et que les Etats ne doivent pas en
apporter.
Reconnaître une présomption de discernement à tout enfant qui demande à être entendu
par le juge dans une procédure qui le concerne.
Le magistrat entendant l’enfant qui le demande pourra alors apprécier son discernement et
sa maturité.
Reformuler l’article 388-1 du code civil en ce sens.
Proposition 2
Les enfants victimes ont besoin d’un soutien individuel, juridique et psychologique tout au long
du parcours judiciaire.
Plusieurs unités d’assistance à l’audition ont été créées rassemblant dans un lieu unique une
équipe pluridisciplinaire de professionnels formés à l’écoute de l’enfant victime, au recueil et à
l’enregistrement de sa parole et aux éventuels examens médicaux nécessaires à la procédure.
Mettre en place sur tout le territoire des unités d’assistance à l’audition afin d’offrir aux
enfants victimes la garantie d’être auditionnés et accompagnés par des professionnels :
policier, gendarme, médecin, dans les meilleures conditions psychologiques et juridiques.
La qualité de l’audition ayant un retentissement sur la procédure.
Une telle démarche ne peut aboutir qu’avec le soutien des pouvoirs publics.
Proposition 3
L’audition du mineur victime doit être filmée. De telles dispositions sont destinées à éviter à
l’enfant de répéter ses déclarations tout au long de la procédure judiciaire à plusieurs reprises
et devant plusieurs interlocuteurs au risque qu’elles soient déformées. (article 706-52 du code
de procédure pénale introduit par la loi du 17 juin 1998, circulaire du 20 avril 1999)
Bien que ces enregistrements soient mis à disposition des magistrats, des experts et des avocats
qui peuvent les regarder à tout moment de la procédure, la loi est muette sur les obligations de
visionnage. La Défenseure des enfants a pu constater qu’ils ne sont que très rarement consultés
par les professionnels auxquels ils sont destinés.
Engager à l’échelle nationale une évaluation de l’utilisation effective des enregistrements
des auditions de mineurs victimes par les professionnels auxquels ils sont destinés.
Favoriser leur consultation et mettre en valeur les informations qu’ils apportent.
Proposition 4
Les réclamations reçues, l’enquête et les auditions menées par la Défenseure des enfants,
montrent que le statut juridique de l’enfant témoin se trouve « hors garanties procédurales ».
Conférer à l’enfant témoin un statut juridique précis qui lui garantisse des droits et prenne
en compte la vulnérabilité due à sa minorité.
Ce statut serait réservé aux enfants témoins des affaires les plus grave
Proposition 5
Promouvoir activement auprès des enfants et adolescents des éléments d’information et
de compréhension d’une « justice adaptée aux enfants » afin qu’ils soient en mesure de
connaître les processus judiciaires, les droits qui sont les leurs, la façon de les exercer et les
accompagnements dont ils peuvent bénéficier.
Le Conseil de l’Europe a adopté en 2010 et diffuse depuis lors des Lignes directrices sur une
justice adaptée aux enfants destinées à améliorer leur accès et leur prise en charge par la justice.
Le cadre judiciaire se révèle généralement impressionnant pour un enfant qui s’y trouve
confronté : le langage juridique, les différents acteurs et leur rôle respectif, le déroulement de
la procédure sont pour lui l’occasion de nombreuses interrogations.
• Développer « une justice adaptée aux enfants » suppose de donner les moyens de connaître
et comprendre le monde de la justice :
Mobiliser l’ensemble des professionnels de l’éducation afin que, dans le cadre d’une éducation
réelle à la citoyenneté et à ses implications, tout enfant et adolescent soit informé
de façon concrète sur le monde de la justice, les droits qui sont les siens et la manière de
les exercer.
Fournir à tout enfant confronté au monde judiciaire une information claire et adaptée à
son âge et à son degré de maturité sur ses droits, la justice et son fonctionnement. Cette
information (plaquettes, outils numériques) devra lui donner les moyens de se repérer entre
les différents acteurs, de comprendre le déroulement de la procédure qui le concerne et,
tout en exerçant ses droits, d’être respecté dans son statut d’enfant.
• Développer « une justice adaptée aux enfants » suppose de donner les moyens à l’enfant
d’être acteur dans une procédure qui le concerne.
Lors des séparations familiales engagées devant le juge aux affaires familiales, la Défenseure
des enfants a pu constater que les enfants sont inégalement informés du droit à être entendu
par ce magistrat.
Informer l’enfant de tous les droits et utiliser tous les moyens pour ce faire : courrier du
greffe adressé à l’enfant, fascicules d’information, consultations gratuites d’avocats destinées
à ce public, sites internet.
Encourager et valoriser la présence d’un avocat formé aux droits de l’enfant aussi bien
devant le juge aux affaires familiales qu’en matière d’assistance éducative.
Renforcer l’information de l’enfant et de l’adolescent quant à ce droit d’assistance afin qu’ils
soient à même de comprendre la procédure judiciaire en cours et la place qui est la leur.
Proposition 6
Faire connaître à l’enfant avec pédagogie ce que devient la parole qu’il a exprimée devant
la justice.
• Lorsqu’un enfant ou un adolescent a été entendu dans une procédure judiciaire, civile comme
pénale, il est rare que les termes ou les motifs de la décision finale du magistrat lui soient expliqués
de façon à ce qu’il les comprenne vraiment.
La Défenseure des enfants a relevé plusieurs situations dans lesquelles des décisions mal
expliquées pouvaient être source de confusion pour l’enfant et, partant, de défiance à l’égard
de la justice :
-- La décision du juge aux affaires familiales après audition de l’enfant lorsque le souhait de mode
de vie exprimé par l’enfant ne correspond pas à son intérêt
-- La décision du juge des enfants en matière d’assistance éducative après audition de l’enfant
-- Le classement sans suite ou la décision de non- lieu après une enquête dans laquelle le mineur a
été entendu comme victime d’agression physique ou sexuelle, lorsque, par exemple, les preuves
réunies n’ont pas permis de poursuivre l’auteur présumé.
Il n’est pas rare que l’enfant ou l’adolescent interprète la décision de justice comme le fait que
ses propos n’ont pas été pris en considération et n’ont pas de valeur.
Le magistrat, l’avocat de l’enfant, le délégué du procureur ou les services éducatifs auraient
à expliquer oralement à l’enfant les décisions judicaires des procédures qui le concernent
dans des termes clairs, adaptés à sa compréhension.
• Lors de l’audition de l’enfant par le juge aux affaires familiales, l’article 338-12 du code de procédure
civile impose l’établissement d’un compte rendu soumis au principe du contradictoire.
Les observations menées par la Défenseure des enfants montrent une diversité de pratiques
dans l’établissement de ce compte rendu et dans l’information qui est donnée à l’enfant.
Inciter les juges aux affaires familiales, sous l’impulsion de la chambre de la famille, à harmoniser
leurs pratiques afin d’éviter des inégalités de traitement entre les enfants, d’assurer
le respect du principe du contradictoire, de protéger l’enfant contre l’instrumentalisation de
ses propos.
• La disparité des motifs justifiant les délégations d’audition ainsi que des modes opératoires
vient affaiblir l’intérêt d’une telle pratique.
Elaborer une charte de la délégation d’audition concourant à créer des références et des
pratiques professionnelles communes.
 
Proposition 7
Le statut actuel de la fonction d’administrateur ad hoc ne permet pas toujours de rendre totalement
effectif le droit d’assistance et de représentation de l’enfant dans les procédures judiciaires
qui le concernent.
Compléter le statut actuel de l’administrateur ad hoc afin de clarifier ses missions, de renforcer
sa formation, son indépendance et ses obligations qui sont autant de gages pour l’enfant
d’une représentation satisfaisante.
Sensibiliser les magistrats à la nécessité de modifier leurs pratiques de recours aux administrateurs
ad hoc : délai de désignation, précision de la mission, obligation de rencontrer
l’enfant afin que celui-ci accède rapidement et pleinement à sa représentation effective et
à ses droits.
Proposition 8
Organiser des formations continues interdisciplinaires et adaptées pour tous les professionnels
en contact avec l’enfant dans le cadre judiciaire afin de les sensibiliser aux spécificités
de l’approche de l’enfant, de créer entre eux une culture et des pratiques professionnelles
partagées.
La formation à la connaissance du développement de l’enfant, des relations familiales, des droits
de l’enfant doit trouver sa place dans la formation initiale et continue de tous les professionnels
qui interviennent dans le cadre judiciaire et sont amenés par leurs fonctions à recueillir la parole
de l’enfant. Comme prévu dans la loi du 5 mars 2007.
• Rendre obligatoire pour tout magistrat prenant de nouvelles fonctions de juge aux affaires
familiales des formations spécifiques à l’approche familiale et à l’audition de l’enfant.
• Instaurer un module de formation initiale commun à toutes les écoles de barreaux, obligatoire
pour tous les futurs avocats.
Rendre obligatoire une formation continue de tout avocat désirant exercer en ce domaine et
valider ces modules au titre de la formation continue.
Développer les conventions entre les barreaux et les tribunaux afin de garantir sur l’ensemble
du territoire la présence d’avocats spécialisés.
• Bien que l’objectif premier de l’enquêteur soit la recherche de la vérité celle-ci ne peut se faire
sans prendre en considération la minorité de l’enfant et sa spécificité.
Rendre obligatoire une formation portant sur les droits de l’enfant, l’approche de l’enfant
et les situations familiales avant toute prise de poste d’un fonctionnaire de police ou d’un
militaire de la gendarmerie exerçant dans les brigades spécialisées.
Proposition 9
Les travaux menés par la Défenseure des enfants se sont heurtés au manque de statistiques
judiciaires, notamment en matière de procédures civiles, ce qui a rendu difficile une évaluation
quantitative, fine et précise de la parole de l’enfant en justice.
Développer des outils permettant une meilleure connaissance de ces situations et notamment
Intégrer dans l’appareil statistique du ministère de la Justice les statistiques nationales
concernant les décisions judiciaires prises à l’occasion des séparations parentales
– divorces ou séparations – (nombre de divorces contentieux ou non dans lesquels un enfant
est impliqué, nombre d’auditions de mineurs par un juge aux affaires familiales…), ainsi que
toute autre procédure judiciaire concernant l’enfant. (délégation d’audition, nomination
d’administrateur ad hoc.)
Proposition 10
La Convention internationale des droits de l’enfant, texte international le plus complet en matière
de droits de l’enfant, ne donne pas la possibilité aux enfants ou aux adultes de s’adresser directement
au comité des droits de l’enfant pour faire valoir leurs droits.
L’assemblée générale des Nations unies a adopté le 19 décembre 2011 le troisième protocole
facultatif à la convention établissant une procédure de plainte pour violation des droits des
enfants. Il a pour objectif de garantir aux enfants la possibilité de recours légaux à un niveau
international afin de les aider à trouver des solutions à leurs difficultés. Ce protocole est ouvert
à la signature depuis février 2012.
Signer et ratifier le 3e Protocole facultatif à la Convention internationale des droits de l’enfant
qui établit une procédure de plainte pour violation des droits des enfants auprès du comité
des droits de l’enfant de l’Onu.