Une nouvelle garantie contre les pensions alimentaires impayées : la loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes
Après une séparation, le premier sujet de discordes est le non paiement ou le paiement retardé de la pension alimentaire mise à la charge du parent chez qui les enfants n’ont pas leur résidence habituelle.
Des sondages récents indiquent un pourcentage alarmant de 40% des pensions alimentaires non honorées en France. Selon un autre sondage, cité dans le communiqué de presse de notre ministre des Droits des femmes en date du 5 décembre 2013, les pensions alimentaires représenteraient près d’1/5ème du revenu des familles monoparentales les plus pauvres. Il n’est pas précisé ce que l’on doit entendre par « les plus pauvres »…
Le projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes a été adopté en première lecture le 28 janvier 2014. Un de ses objectifs est donc d’assurer un meilleur recouvrement des pensions alimentaires par les parents qui élèvent seuls leurs enfants.
À l’occasion de l’adoption du projet, il a été mis en ligne un simulateur de calcul des pensions alimentaires qui permet aux familles de calculer le montant de la pension alimentaire en fonction des critères objectifs tels que le nombre d’enfants à charge, les modalités de leur garde et surtout le salaire net du débiteur de la pension.
Le simulateur est disponible à l’adresse suivante :http://femmes.gouv.fr/simulateur-de-pension-alimentaire/.
Jusqu’ici « rien de nouveau sous le soleil » puisque la table de référence annuelle existe déjà depuis de nombreuses années. Les simulateurs quant à eux, étaient jusque là davantage destinés à un public de professionnels.
Cette vulgarisation de la table de référence aura pour effet de donner une idée au créancier de la pension à solliciter. Il ne faut toutefois pas prendre ces informations pour argent comptant : les montants affichés n’ont qu’un caractère indicatif et ne sont pas en mesure de lier le magistrat saisi qui prendra en considération bien d’autres critères : patrimoine des uns et des autres, les besoins particuliers de l’enfant (handicap, école privée…), le coût des transports pour l’exercice du droit de visite…
Ce qui va changer
Aujourd’hui, un parent (souvent la mère c’est un constat) peut réclamer « l’ASF » (Allocation de Soutien Familial) à sa caisse d’allocations familiales s’il démontre que la pension alimentaire des enfants (à l’exclusion de toute autre pension ou rente) n’a pas été versée pendant 2 mois consécutifs.
Pour avoir droit à cette aide d’un montant actuel de 90,40 euros par enfant à charge, il faut vivre seul.
La CAF, par la suite, est censée prendre la place du parent et engager des poursuites contre le parent défaillant.
Dans la pratique, les poursuites ne sont quasiment jamais engagées. Le seul « rattrapage » s’effectue lorsque le parent défaillant sollicite des allocations. S’il est bénéficiaire, le montant de l’ASF lui sera alors déduit de son allocation.
Avec le projet de loi, le montant de l’ASF sera revalorisé progressivement pour atteindre les 120 euros en 2018 (si la loi s’applique toujours en 2018…). La première majoration aura lieu le 1er avril 2014 et sera de 5 euros par mois et par enfant.
A compter du 1er juillet 2014, une expérimentation sera mise en œuvre dans 20 départements : Ain / Aube / Charente / Corrèze / Côtes d’Armor / Finistère / Haute-Garonne / Hérault / Indre-et-Loire / Loire-Atlantique / Haute-Marne / Meurthe-et-Moselle / Morbihan / Pas de Calais / Rhône / Saône-et-Loire/ Paris / Seine-et-Marne / Territoire de Belfort / La Réunion.
Cette expérimentation constitue le principal attrait du projet de loi.
Dans ces départements, l’ASF sera ainsi accordée à l’issue d’un mois d’impayé seulement.
Il a également été rajouté au projet de loi que son bénéfice sera maintenu en cas de remariage, de PACS ou de concubinage notoire du parent créancier pour une durée fixée par décret. Il est vrai que le beau-père ou la belle-mère n’est en principe pas débitrice d’aliments. Il est toutefois surprenant de faire jouer la solidarité nationale avant la solidarité familiale…
La grande innovation pour les parents créanciers sera la mise en place d’une pension alimentaire minimale, même en cas de pension alimentaire honorée par l’autre parent : si le montant mis à la charge du débiteur d’aliments est inférieur au montant de l’ASF, le parent créancier recevra un complément. Il s’agit donc en quelque sorte d’un RSA pour enfant… à méditer !
Il est également prévu que la CAF pourra transmettre au créancier ou au juge aux affaires familiales les informations dont elle dispose sur les revenus du débiteur afin que le parent créancier puisse saisir ou re-saisir le juge aux affaires familiales en connaissance de cause. Cette disposition semble tout à fait intéressante et pertinente dans la mesure où les parents sont censés divulguer spontanément toutes leurs ressources au magistrat, ce qu’ils font bien entendu rarement !! Les déclarations sur l’honneur en France ne reflètent pas toujours la vérité et le sens de l’honneur semble parfois bien loin du signataire…
Les procédures de recouvrement forcé des pensions déjà existantes seront renforcées pour les parents créanciers qui souhaitent poursuivre directement les parents débiteurs défaillants. La procédure de paiement direct de la pension par l’employeur du débiteur pourra couvrir non plus seulement 6 mois d’arriérés mais 24 mois. Il s’agit là-aussi d’une disposition intéressante car cette procédure de recouvrement direct est relativement rapide à mettre en œuvre et très efficace.
Rappelons que les créances alimentaires passent avant toutes les autres créances. Ainsi, la pension alimentaire sera nécessairement réglée avant le crédit à la consommation.
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